Mardi Informel de La Générale

Workshop

Résidence de travail


Ce mardi 20 février, le Mardi Informel de La Générale reçoit Léo Dumont-Deslaurier pour un retour sur son expérience de terrain au Centre national d'entraînement des forces de gendarmerie (CNEFG). Léo Dumont-Deslaurier est un jeune designer diplômé de l’ENSCI - Les Ateliers, et originaire de Normandie. Positionnés aux frontières du design, ses projets s’inscrivent dans une démarche militante, œuvrant pour la justice sociale et l’écologie. Ses récents travaux portent sur le rôle politique de l’image, qu’il utilise comme sujet d’analyse et comme outil documentaire. De ces recherches il tire des réponses aux formes multiples, se jouant des stratégies détectées pour imaginer des outils les contournant, les annulant; des outils malicieux pensés pour être accessibles au plus grand nombre. Instagram : @du.mont.des.lauriers

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Nous nous installons avec les commandants R et O pour prendre un café et partager des cookies dans une petite salle bordée de canapés. [Ils] commencent à me raconter avec entrain les grandes bases du maintien de l’ordre, leurs parcours respectifs, et me questionnent sur la pratique du design.

Les langues se délient vite.

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J’en viens rapidement à parler de mise en scène de la violence. Loin de s’offusquer, ils abondent en mon sens : le symbole de la force, comme l’usage réel de la violence, font tous deux parties prenantes d’une mise en scène calculée. Les médias sont – selon les situations et selon leur orientation politique – des alliés ou des adversaires dans cette bataille de l’image.


Le commandant R ajoute, sans même que j’oriente la discussion en ce sens : « la Gendarmerie nationale étant une institution militaire sous l’autorité du Ministère de l’Intérieur, comme la Police, elle est régie par des intérêts politiques. Concrètement, il est demandé aux forces de l’ordre de réprimer plus fortement tel ou tel mouvement social, indépendamment de son degré de violence ».

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Il y a bientôt un an, près de 3200 gendarmes ont défendu, coûte que coûte, ce qui n’était alors qu’un trou boueux, la future méga-bassine de Sainte-Soline. Gazage indiscriminé, tirs de LBD depuis des quads en mouvement, retardement volontaire des secours, usage de grenades catégorisées “matériel de guerre” : une répression dénoncée par la Ligue des Droits de l’Homme comme inutile, disproportionnée, indiscriminée.

Bien que l’évènement ait relancé le sujet des violences policières, quelques mois seulement avant le meurtre de Nahel Merzouk, il est intéressant de noter qu’il n’était ici pas tant question de police – ni CRS, ni BAC, ni BRAV-M – mais bien de gendarmes dédiés au maintien de l’ordre. Ces derniers bénéficient souvent d’une meilleure réputation, basée sur leur formation : à la différence de leurs homologues policiers, connus pour leur brutalité, les gendarmes mobiles (GM) sont spécialement formés au maintien et au rétablissement de l’ordre.

Quelques mois plus tôt, dans le cadre de ma recherche de mémoire en design, je passais trois jours au sein du principal centre français de formation des GM, officiellement pour étudier l’évolution de l’équipement du maintien de l’ordre, secteur d’innovation porteur chez les designers.

Ce mardi 20 février, je vous propose de revenir en image et en anecdotes sur cette courte mais intense expérience de terrain, ce théâtre de guerre livrant un point de vue privilégié sur ce qui constitue aujourd’hui le maintien de l’ordre à la française, entre prolifération des armes “non-létales” et animalisation des foules, culture viriliste et esthétisation de la violence.

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Les Mardis Informels de La Générale (MIG) sont une série de workshops transdisciplinaires, à la croisée de l'art et de la science, où sont discutés des grands enjeux de société en lien avec la technologie, le numérique, l'économie, la finance, l'énergie, l'alimentation, l'extractivisme et le colonialisme (ressources agricoles, minières, sous-marines, ...) le biologique, l'imaginaire technopositiviste (spatial, metaverse, biotech, transhumanisme,...), les nouveaux régimes écologiques (climat, biodiversité). Chaque semaine, un.e intervenante.e est invité.e.

Intervenant.es en 2021-2022 : Soline NIvet (architecte, chercheuse), Pablo Jensen (physicien), Christophe Bonneuil (historien), Clémence Seurat (éditrice, curatrice), Pinky Htut Aung (artiste, activiste), Flaminia Paddeu (géographe), Gwenola Wagon (artiste Chercheuse, Paris 8), Nicolas Taffin (éditeur, graphiste), Ewen Chardronnet (conquête spatiale), Renata Avila (droit international), RYBN (finance offshore), Raffart-Roussel (art et technologie), Marcel O'Gorman et Jennifer Clary-Lemon (art et ornithologie), Nora Hauswirth (curatrice), Index.ngo (modélisation 3D et expertise policière), Paolo Cirio (justice climatique), Antoine Leudière (cryptographie), Bertrand Charles (relations internationales), Olivier Dubourdieu (Mica Initiative, extractivisme), Laurent Carlier (art numérique), Adriana Knouf et Shu Lea Chang (performance), Marie Lechner et Oulimata Gueye (On-Trade-Off), Pierre Madelin (philosophie), Frédéric Neyrat (philosophie), Robereto Dell'Orco (mycologie), Disnovation.org (disnovation), Xiao Xiao (traitement du signal).

La Générale est mise à la porte fin novembre 2024 !